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Devoirs et leçons: est-ce que bouger permet de mieux apprendre?

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Mimer un chat en apprenant le mot espagnol gato, avancer et reculer sur un axe tracé au sol suivant la suite des nombres, faire des bonds en pleine addition… cette méthode d’apprentissage aurait des avantages plus grands que simplement pimenter une séance d’études qui manque de souffle.

Devoirs et leçons: est-ce que bouger permet de mieux apprendre?
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On connait l’impact positif des pauses actives dans la classe, ainsi que celui du mouvement fait en parallèle à l’apprentissage. Des recherches vont aujourd’hui encore plus loin en proposant une synergie plus grande entre les mouvements et l’apprentissage. Place à la cognition incarnée (ou embodiement dans le jargon anglophone).

 

Apprendre mieux en bougeant

« La cognition incarnée propose l’intégration d’activités motrices cohérentes avec la notion en cours afin de faciliter les apprentissages », Mariève Blanchet, Ph.D, professeure au département des sciences de l’activité physique de l’UQAM et chercheuse au laboratoire de recherche en motricité de l’enfant.

 

On sait déjà qu’un enfant qui rentre de la récréation, après un retour au calme, se sent plus disposé pour attaquer ses conjugaisons et qu’un enfant qui manipule une balle pendant qu’on lui explique des règles de grammaire ou qui pédale en faisant ses divisions se concentrera mieux à la tâche, en particulier s’il présente des signes d’hyperactivité. Les bienfaits du mouvement dans ces contextes ont été largement documentés et prouvés.

 

« La théorie de la cognition incarnée va plus loin en supposant que, si pendant un apprentissage, au lieu de ne solliciter que mes yeux — regarder la matière au tableau, par exemple — j’enrichis ma compréhension par d’autres informations sensorielles et par les mouvements de mon corps, je retire un complément d’information qui peut appuyer les apprentissages de façon bénéfique chez certains enfants », explique la chercheuse.

 

« L’important, c’est de choisir une tâche motrice pertinente, mais aussi simple, afin que les ressources cognitives soient mobilisées vers l’apprentissage, et non perdues à tenter de maîtriser le mouvement », précise la professeure.

 

 

De la recherche, encore de la recherche !

Théorie intéressante, mais qu’est-ce qu’on devrait faire pour aider notre ado à se remémorer les capitales des pays à l’étude ou pour outiller notre plus jeune dans ses additions complexes ? La réponse reste à venir…

 

L’importance de la motricité chez l’enfant pour construire sa représentation du monde ne date pas d’hier, mais la prise de conscience du rôle fondamental du corps en apprentissage — et pas seulement pendant la petite enfance — est assez récente. Les études ne permettent, pour l’instant, ni consensus ni protocole clair que les professionnels (et les parents motivés) pourraient adopter. « Il n’est pas simple de choisir les gestes et les sensations selon le type d’apprentissage désiré. En outre, il faut moduler ces activités motrices selon le niveau d’apprentissage — une nouvelle matière ou de la révision n’impliquera pas le même dosage — et enfin prendre en compte que chaque enfant est unique ! » explique Mariève Blanchet

 

« On ne sait pas non plus si l’approche de la cognition incarnée est efficace pour des enfants qui ont un développement atypique, par exemple chez un jeune avec un trouble de la coordination, est-ce que ce sera utile ou nuisible? », se questionne la professeure.

 

Le développement de protocoles (et leur éventuelle validation scientifique) implique ainsi une équipe multidisciplinaire spécialisées en didactique, en motricité et en développement de l’enfant, afin que ces professionnels réunissent leur expertise pour créer des liens forts entre activités motrices et apprentissages.

 

Tester l’approche à la maison

Malgré tout, rien ne nous empêche, en tant que parent, de vérifier si quelques pistes de cognition incarnée peuvent être bénéfiques pour votre enfant. Hop, aujourd’hui, on mime nos mots de vocabulaire !

 

Les indices qu’on est sur la bonne voie ? L’ajout de la motricité n’augmente pas le niveau d’erreur par rapport à une activité standard papier-crayon, n’allonge pas le délai de réponses et ne s’accompagne pas de problèmes de coordination (ou de chute !).

 

Le consensus demeure qu’en général, bouger pour apprendre, c’est loin d’être une mauvaise idée ! « En cas de troubles d’apprentissage, le mieux demeure de demander conseil à des spécialistes », conseille Mariève Blanchet.

 

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