Activités physiques et santé psychosociale des enfants : une relation de cause à effet?
Si les effets bénéfiques de l’activité physique sur la santé sont bien connus, ceux qui touchent l’aspect psychosocial sont moins documentés.
La majorité des études indiquent une association entre la pratique d’activités physiques et la santé psychosociale des enfants, mais ne parviennent pas à faire ressortir un lien de causalité. De plus, la nature des activités physiques (type, durée et intensité) qui pourraient avoir le maximum d’effets bénéfiques psychologiques et émotionnels est mal définie. Dans cet article, on présente une synthèse de la littérature concernant les effets de l’activité physique sur les différents déterminants de la santé psychosociale des enfants.
Gestion du stress et de l’anxiété
Il existe plusieurs études indiquant des effets salutaires de la pratique d’activités physiques sur la gestion du stress chez l’adulte. Ainsi, une séance d’activité aérobie de 30 minutes, d’intensité moyenne ou élevée, permet de réduire les tensions musculaires pendant 4 à 6 heures ainsi que le stress. Des études de cas indiquent même qu’une pratique régulière d’activités physiques pourrait atténuer l’intensité des attaques de panique et aider au traitement des phobies.
Bien que le stress soit devenu un problème important même chez les enfants, peu d’études ont été effectuées auprès de cette population. Selon l’une d’entre elles, un programme de 10 semaines de séances de 30 minutes d’activité physique encadrée réduirait l’anxiété chez des enfants de 4 ans en santé. Par ailleurs, il semble que les jeunes en meilleure condition physique gèrent mieux le stress que les autres (au secondaire et au collégial).
La compétition sportive peut quant à elle être source de stress. Il semble que les sports individuels (p. ex. gymnastique, patinage de vitesse, karaté) occasionnent plus de stress que les sports d’équipe. Toutefois, le stress généré par la compétition sportive reste similaire au stress lié à l’école ou aux autres activités compétitives, tant que l’expérience sportive est gratifiante et que l’estime de soi du jeune est préservée.
Dépression
La dépression chez les Canadiens de 12 à 17 ans est de plus en plus fréquente. La majorité des études indique que la pratique régulière d’activités physiques permet de prévenir son apparition et de favoriser son traitement, autant chez l’adulte que chez l’adolescent. Les mécanismes par lesquels l’activité physique agit pour réduire les symptômes de la dépression sont cependant mal compris. Que ce soit en augmentant les niveaux des neurotransmetteurs (p. ex. la sérotonine) et des opiacés (p. ex. les endorphines), en détournant momentanément l’attention des facteurs de stress, en faisant vivre des expériences de réussite ou en aidant à surmonter des obstacles au quotidien, l’activité physique a un rôle d’importance dans la prévention et le traitement de la dépression.
Troubles de l’attention, hyperactivité, troubles d’apprentissage et autisme
Très peu de chercheurs ont examiné l’effet de l’activité physique chez les enfants atteints de troubles cognitifs. Toutefois, un programme de jogging de 10 à 22 semaines a permis de réduire la médication des enfants atteints du trouble de l’attention avec hyperactivité. Par ailleurs, les effets d’un programme d’activité physique chez des enfants atteints d’un trouble d’apprentissage n’ont été étudiés que dans une seule recherche. Dans cette étude, après 20 semaines d’entraînement, les enfants avaient amélioré leur estime de soi et de leur condition physique, mais pas leurs résultats scolaires.
En revanche, chez de jeunes autistes, de fréquentes périodes de 5 à 8 minutes d’activité physique permettent de réduire les comportements d’autostimulation (mouvements répétitifs sans but apparent), sans pour autant améliorer la fonction sociale.
Estime de soi
Un nombre important d’études indiquent qu’un programme d’entraînement est associé à de meilleurs scores d’estime de soi. Il semble que, chez l’enfant, le lien entre l’activité physique et une saine image de soi soit plus fort lorsque l’activité physique pratiquée est de type aérobie.
Intelligence
La pratique d’activités physiques n’a aucun effet sur le niveau d’intelligence, autant chez les enfants en santé ou ceux atteints d’un retard mental. Toutefois, certaines études indiquent que l’activité physique permettrait d’améliorer les résultats scolaires des enfants en santé.
Délinquance juvénile
Plusieurs études indiquent un faible niveau de délinquance juvénile dans les groupes de jeunes athlètes, par rapport aux non-athlètes, probablement parce que l’activité physique permet de « brûler » de l’énergie et de se défouler, procure de l’excitation et des sensations fortes et qu’elle occupe les temps libres des jeunes. La pratique d’activités physiques serait même liée à des relations familiales plus harmonieuses.
Ainsi, bien que d’autres recherches soient nécessaires pour mieux cerner le lien entre activité physique et santé mentale, et surtout pour préciser la nature des activités les plus appropriées, il semble que l’activité physique contribue à une meilleure gestion du stress, favorise la concentration et la réussite scolaire, améliore l’estime de soi et réduise la délinquance juvénile.
Par Myriam Paquette, Lyne Lyons, Karima Djellouli et Guy Thibault, Kino-Québec
Source : Nieman P. (2002) Psychosocial aspects of physical activity. Paediatr Child Health 7:309-12.