Une étude réalisée par Collard (2002) sur la notion de risque dans les défis sportifs met de l’avant un aspect troublant quant à la perception des « accidents » qui surviennent lors d’activités sportives dites risquées. De façon générale, pour le sportif d’élite (qu’il soit amateur ou professionnel), les causes de l’échec, de la contre-performance et de la blessure dépendent de lui. Et il assume cette responsabilité. Inversement, le « non-sportif » aura plutôt tendance à blâmer des facteurs externes sur lesquels il n’a que peu ou pas d’influence. S’il ne réussit pas, c’est donc à cause des règles du jeu qui ne sont pas les bonnes, de l’arbitre qui est incompétent, ou encore du temps qui est exécrable!
Avec la collaboration de Luc Parlavecchio, Catherine Plante et Anaïs Cosset*
Encourager un jeune sportif à accepter sa responsabilité est essentiel. Cela lui permettra de comprendre le « potentiel d’influence » qu’il a sur sa réalité. Le jeune doit prendre conscience que ses chances de succès sont directement liées à son aptitude à s’engager physiquement, psychologiquement et socialement. Il doit devenir metteur en scène et acteur de ce qu’il entreprend.
En acceptant de s’engager coûte que coûte, le jeune quitte sa zone de confort. Ce déséquilibre est toutefois nécessaire à son amélioration. Il peut néanmoins avoir des effets « néfastes » parce qu’il inclut implicitement un risque d’échec. Mais, c’est aussi l’occasion d’apprendre à négocier avec la réalité et avec ses propres limites.
Un jeune peut, pour éviter un éventuel échec, refuser de s’engager ou se désengager en prétextant des facteurs externes. Il faut alors le convaincre que la persévérance lui sera bénéfique sur plusieurs plans. Le jeune doit comprendre que l’acceptation des facteurs de risque peut, par exemple, augmenter ses motivations et lui permettre de concrétiser ses aspirations dans plusieurs aspects de sa vie (Spaaij, 2011).
Dans une recherche-action sur le sport chez les jeunes [1], nous nous sommes intéressés aux effets de l’abandon d’un projet sportif. Nous avons pu observer que l’importance accordée à la responsabilité individuelle menait les membres d’un groupe à en vouloir à ceux qui ne se rendaient pas jusqu’au bout du programme, ce qui peut nuire à la volonté d’implication future des jeunes et provoquer chez ces derniers de la culpabilité.
Comment encourager la responsabilité individuelle tout en évitant que les jeunes moins impliqués ne se culpabilisent pour leur manque de persévérance ?
Des objectifs réalistes
Il est important que les préadolescents aient des objectifs sportifs diversifiés et adaptés à leurs capacités. Pour que la responsabilisation ait des effets positifs, il faut s’assurer que les objectifs sont difficiles, mais réalisables. Il est aussi pertinent d’inclure le jeune dans le choix de ses objectifs sportifs pour qu’il se les approprie (Sandford, Armour, & Warmington, 2006).
Une question de perception
En cas d’échec, il est capital de réagir adéquatement. La réaction des parents lors d’une contre-performance influence les perceptions des jeunes concernés. Il est important que les parents et l’entourage acceptent les échecs et encouragent les jeunes à continuer et à apprendre de leurs difficultés. La réaction de l’entraîneur joue également un rôle central. L’attitude qu’il adopte auprès de l’équipe peut éviter le rejet de certains joueurs, ou le sentiment de culpabilité de ces derniers.
Prendre des risques « balisés » dans le cadre de défis sportifs peut être une source d’apprentissage. Si les jeunes sont confrontés à des défis réalistes et encouragés par leurs parents à continuer malgré les difficultés, cela peut être l’occasion d’acquérir des habiletés sociales qui leur seront profitables toute leur vie.
Un outil précieux pour le jeu risqué |
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Consultez la brochure Sécurité bien dosée, enfant comblé, qui offre aux adultes (intervenants ou parents) des pistes de réflexion sur l’importance de la sécurité bien dosée et de la prise de risque pour le développement de l’enfant ainsi que sur le rôle qu’ils peuvent jouer. |
Bibliographie
- COLLARD, L. (2002). Le risque calculé dans le défi sportif, L’année sociologique, 2(52), 351-369.
- Comité scientifique de Kino-Québec (2011). L’activité physique, le sport et les jeunes — Savoir et agir. Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport.
- MOREAU, N. (2009). État dépressif et temporalité. Contribution à la sociologie de la santé mentale. Montréal : Liber.
- SANDFORD, R. A., ARMOUR, K. M., & WARMINGTON, P. C. (2006). Re-engaging Disaffected Youth through Physical Activity Programmes. British Educational Research Journal, 32(2), 251-271.
- SPAAIJ, R. (2011). Building Social and Cultural Capital Among Young People in Disadvantaged Communities: Lessons from a Brazilian Sport-Based Intervention Program. Sport, Education & Society, 17(1).
[1] Dans cette recherche-action, financée par le ministère du Développement Économique, de l’Innovation et de l’Exportation, nous souhaitons modéliser le programme sportif d’intervention Alter-Action offert par l’organisme DesÉquilibres. Cette étude mettra en lumière les différentes caractéristiques et les effets sur les jeunes d’une pratique sportive centrée sur la coopération et le dépassement de soi.