Vincent Hudon, kinésiologue et préparateur sportif, entraîne les athlètes du programme sport-études de l’école secondaire De Mortagne à Boucherville, les cyclistes du Vélo Club Longueuil et de jeunes danseurs de breakdance. Vincent nous parle de son expérience et partage avec nous ses trucs pour motiver les jeunes.
Allons-y sans détour, comment motive-t-on un jeune à faire de l’activité physique?
On ne peut pas forcer la motivation. Elle doit venir de l’intérieur, en d’autres termes, être intrinsèque. Au mieux, on peut l’entretenir. Si le jeune a besoin d’être stimulé tout le temps, il devient dépendant et ne se responsabilise pas. Ça ne dure pas. Jamais, il ne développera un amour pour le sport. Et moi, c’est ce que je recherche : des jeunes à qui je peux transmettre ma passion pour le sport, avec qui je peux, grâce au sport, avec qui je peux partager des valeurs associées au sport — avoir des objectifs, travailler fort.
Comment décrirais-tu alors ton rôle d’entraîneur?
Je joue un rôle de relation d’aide auprès des jeunes pour la poursuite de leurs objectifs sportifs. Ces objectifs, on les établit ensemble, le jeune et moi, selon l’approche SMART [chaque objectif doit être Spécifique, Mesurable, Acceptable, Réaliste et Temporellement défini]. Le A, moi, je le définis comme ACCOMPLISSEMENT : pourquoi veux-tu atteindre cet objectif-là? C’est une question clé, parce que c’est la source de motivation du jeune. Il faut en tenir compte.
J’influence et je rassemble. Le leadership est important. Les jeunes doivent sentir que tu sais où tu t’en vas, que tu connais ton affaire.
Comment qualifierais-tu ton approche auprès des jeunes?
Je veux que les jeunes me perçoivent davantage comme un grand frère que comme un enseignant. Je ne crois pas à la vieille mentalité d’entraîneur dictateur. Mes jeunes ont beaucoup de liberté. Certains parents me trouvent trop relax avec leurs enfants… mais les résultats sont là!
Sens-tu que cette approche est payante pour favoriser la motivation?
Très payante. Cette relation amicale apporte beaucoup de positif. Si tu es trop autoritaire et que tu ordonnes sans écouter, les jeunes ne te diront rien du tout. C’est donnant-donnant : en offrant de la liberté, on reçoit du « feedback » en retour.
Qu’est-ce que ce « feedback » te donne?
Je connais mieux le jeune. C’est de cette façon que j’arrive à bien communiquer avec lui, à personnaliser ses entraînements pour le faire progresser et, finalement, à entretenir sa motivation. Et comme c’est ça mon rôle, ça me permet de bien le faire.
Quel serait le critère important d’un entraînement pour motiver les jeunes?
La variété. Pour garder leur intérêt et éviter qu’ils s’ennuient. De toute façon, la spécialisation précoce, ce n’est généralement pas bon. Même les jeunes de mon équipe sport-études en cyclisme touchent à tout : musculation, natation, patinage, escalade, yoga, etc.
J’ajouterais la créativité. Avant chaque entraînement, je demande aux jeunes ce qu’ils veulent faire. J’ai déjà un programme préparé, mais je les écoute. De toute façon, on peut développer des aptitudes physiques de plusieurs manières différentes. J’arrive ainsi à suivre mon plan, tout en tenant compte de leurs envies. Ils apprécient.
Quel genre d’ambiance d’entraînement motive le jeune, selon toi?
Je qualifierais ça de chaos structuré. Ça niaise un peu des fois. Les jeunes s’amusent, mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de règlements. Par exemple, quand un jeune fait un exercice, il a une forme « d’immunité », c’est-à-dire que personne ne doit le déranger.
Est-ce que l’effet de groupe a un rôle dans la motivation des jeunes?
C’est certain que vivre la même chose en groupe a un effet motivant sur le jeune. Juste avoir un rendez-vous, une heure précise à laquelle il sait qu’une équipe ou qu’un entraîneur sera là pour lui, ça le motive. Il faut toutefois faire attention avec les entraînements de groupe : les jeunes ont tendance à beaucoup se comparer aux autres, ce qui peut les démotiver ou leur mettre de la pression supplémentaire. Encore une fois, une approche personnalisée permet d’éviter ça. Il faut leur rappeler leurs objectifs individuels, les conscientiser sur le dépassement de soi, d’abord.
Que dirais-tu à ceux qui côtoient des jeunes qui ne sont pas motivés à bouger?
De voir au-delà de « l’activité physique ». Mes cours de breakdance, par exemple, vont chercher des jeunes qui ne sont pas intéressés par les activités physiques. Or, le breakdance est une danse acrobatique très… physique! C’est la musique ou le mode de vie du breakdance qui les attire. Quoiqu’il en soit, les jeunes bougent finalement beaucoup.